Le monde agricole évolue et le nombre de fermes décroit depuis les 20 dernières années. En 2020, au Québec, l’on compte 29 000 fermes alors qu’on en comptait 38 000 en 1991. Toutefois, les entreprises existantes sont plus grosses qu’auparavant et génèrent davantage de revenus bruts.
La population agricole du Québec connait un vieillissement rapide et l’on estime que 40% des producteurs quitteront l’agriculture entre 2014 et 2024. Ainsi, si le nombre de fermes diminue, que le nombre de cédants augmente et que les fermes continuent de croître, les transferts d’entreprise deviendront de moins en moins viables et les jeunes auront moins accès au capital agricole.
Selon des estimations calculées en fonction des producteurs actuels de plus de 65 ans n’ayant pas identifié de relève, il y aurait, dans les 10 prochaines années, entre 502 et 628 fermetures de ferme au Québec, majoritairement situées en Montérégie.
Historiquement, les fermes familiales se sont toujours transférées de père en fils au Québec. La tendance des transferts familiaux favorise toujours plus les hommes. Certains propriétaires d’entreprises préférant même procéder au démantèlement plutôt que d’effectuer un transfert à une femme.
Afin de maintenir l’industrie agricole vivante, il est donc prioritaire de sensibiliser les propriétaires de fermes à la question des transferts féminins. Pour y arriver, on doit démystifier les croyances et les préjugés qui persistent, relativement aux femmes entrepreneures, aux conjointes de producteurs et aux belles-filles dans le monde agricole. Il y a autant de travail à faire dans nos organisations qu’auprès des nombreux fournisseurs et prestataires de services.
LIENS UTILES
- L’Arterre
- Avenir Entreprises Agricoles de la Mauricie
- Syneraction Management (accompagnement en transfert d’entreprise)
En savoir +
Le transfert d’entreprise est une transaction différente de la vente classique, car le cédant effectue une transition graduelle de direction vers la relève et continue souvent à s’impliquer dans l’entreprise.
Lors du transfert de l’entreprise familiale, ce sont souvent les actifs, la machinerie, les dettes et les bâtiments qui sont pris en considération. Pourtant, 75% des facteurs d’échec en lien avec l’établissement de la relève touchent les aspects humains. Les principales causes d’abandon sont :
- une vision divergente de l’avenir de l’entreprise
- une méfiance du cédant envers sa relève / motivation faible de la relève
- une communication difficile ou contradictoire
- la transmission d’une vision aliénante de la profession
- la difficulté de déléguer ou de partager les responsabilités
- la gestion déficiente de l’entreprise / le manque de modernité de l’entreprise
- la méconnaissance des ressources disponibles
- le fait que la relève intéressée soit une fille au lieu d’un garçon
Le système d’entreprise familiale est un système complexe, car l’entreprise familiale évolue dans une zone d’activité et de décision qui a un impact sur la famille et sur l’entreprise. Elle amène une dimension émotive qui implique de nombreuses relations parfois difficiles à gérer.
Combiné à ces facteurs, 58% des propriétaires avouent connaître une difficulté psychologique à vendre leur entreprise et la plupart trouvent ardu de parler librement de cette transaction à leurs employés, familles et partenaires. Il y a souvent une notion de perte identitaire associée au transfert.
Les rôles fondamentaux de la famille sont de nourrir les gens qui la composent, de valoriser leur estime et de véhiculer des valeurs propres. De l’autre côté, une entreprise vise à réaliser des profits. Une entreprise familiale doit ainsi réussir à concilier à la fois le succès économique et l’harmonie familiale, un défi qui peut être difficile à surmonter. La proximité du domicile et de l’entreprise entraine des contacts fréquents et étroits entre ses propriétaires et la frontière famille/ferme devient flexible.
Lorsque des conflits subviennent entre le parent cédant et la relève, l’autre parent, généralement la mère, est souvent pris en sandwich et doit agir à titre de médiatrice entre les deux parties. Cette situation est très difficile au niveau émotionnel.
Divers conflits peuvent survenir lorsque la relève et les cédants sont jeunes (20 ans-40 ans) car les propriétaires souhaitent davantage consolider leurs acquis et les jeunes, rêvent d’expansion. De l’autre côté, si la relève n’a pas suffisamment de part de l’entreprise à l’approche de la quarantaine, elle se voit frustrée et risque de laisser tomber. La meilleure période pour favoriser un transfert bien planifié, échelonné sur une période idéale de 5 à 15 ans, est dans la trentaine pour la relève et dans la cinquantaine pour le cédant.
En amont du transfert, plusieurs questions doivent être abordées ouvertement et réglées afin de favoriser un climat harmonieux et d’exprimer des intentions claires de part et d’autre. Il ne faut pas avoir de crainte à parler de transfert et de retraite. Pour que des solutions se trouvent, les préoccupations, intérêts et enjeux doivent se dirent. D’autres sujets sensibles doivent aussi être transparent dont :
- le lieu d’habitation des parents et de la relève
- la place des parents dans l’entreprise
- la relation avec les frères et sœurs
- l’équité financière avec le reste de la famille
- le prix de vente
- la place du conjoint dans l’entreprise
- les différences de valeurs entre les générations
Une étude sur le degré de communication entre les propriétaires et leur relève, a démontré que 44% des jeunes sous-estiment le temps avant que se réalise le transfert complet de l’entreprise comparativement aux attentes des cédants. Aussi, 34% des propriétaires ont affirmé que leur relève n’avait pas monté de dossier d’établissement alors que celle-ci en avait un. Finalement, 20% des entreprises sondées ont des visions opposées quant au développement de la ferme dans les années à venir.
Dans tout transfert d’entreprise agricole, la culture participative est plus favorable au développement de la relève et à son épanouissement. Une culture patriarcale est généralement un frein à l’apprentissage. Globalement, 80% des individus sont résistants au changement, dont 20% seront complètement réfractaires. Plus les facteurs de résistance sont nombreux lors de l’introduction d’un changement, plus les initiateurs doivent déployer de l’énergie pour diminuer cette résistance. Ainsi, une trop forte résistance, de part et d’autre, pourra mener à l’abandon du processus d’établissement de la relève. Une planification et une excellente communication sont les principaux éléments qui préviennent cette résistance et facilitent le changement plus en douceur.
Ce processus de planification, bien qu’essentiel, est bien effectué par seulement 11% des cédants et 19% des relèves identifiées.
Outils de sensibilisation au transfert
À venir…